Emeline MASSON détient désormais un record mondial d’immersion avec 13h20 (sans apport de gaz après l’immersion – bi 7 et 5 “déco”) réalisé à la piscine de Morzine lors du dernier Téléthon. Elle nous raconte avec talent ces moments si difficiles. Tom GRUNDMANN, son compagnon, a quant a lui détient un record mondial pour avoir passé 30h sous l’eau avec le seul stock d’air embarqué lors de son immersion (bi 10 et 6 “déco”).
“C’est d’abord l’histoire d’un fil rouge, un événement qui crée une aventure humaine, qui pousse des personnes ordinaires à relever des défis extraordinaires pour une cause comme le Téléthon.
C’est aussi l’histoire d’une femme passionnée par un sport essentiellement masculin dans lequel il est parfois difficile d’être reconnue.
Ainsi par solidarité, par envie, par fierté, par orgueil, par folie, …je vais passer 24h sous l’eau !
Il faut alors convaincre, trouver le matériel adéquat et pour une femme, c’est le parcours du combattant : trouver une purge pipi qui tienne 24h… Les premiers essais sont décourageants mais pas longtemps quand vous avez Tom comme « personal trainer ». Le jour J, Virginie (sage-femme de métier) et moi, mettons 2 heures à l’installer, à tester, à recoller… il faut que ça tienne. Et ça tiendra coûte que coûte ! C’est un défi, le matériel en fait partie.
Dans l’eau, en attendant l’immersion, avec mon bi et mes 5 décos, nous pouvons oublier le lestage. Deux plongeurs, Nicco et Stephan (l’un des plongeurs de « l’Odyssée », la classe !) m’aident à rester en surface. Ils n’ont qu’à me lâcher à 19h pour l’immersion. Dégonfler ma stab n’est qu’un réflexe.
Ainsi l’aventure se poursuit. Certains pensent qu’elle ne fait que commencer, pas pour moi. C’est juste le moment d’être digne du fil rouge, du Téléthon, de l’équipe qui m’accompagne et me supporte depuis des semaines.
Tom m’attend. On se retrouve enfin. Je me rends compte que cet après-midi a été très long. Cela fait 6h qu’il est déjà dans l’eau. J’ai juste eu le temps de le voir avant son immersion lorsque je suis arrivée du travail. Il m’aide à trouver mes marques, s’assure que tout est bien en place. Mais très vite je me mets dans ma bulle. La première heure est calamiteuse à cause du masque. Problème de buée et c’est une première avec ce masque. Je mets les nerfs de Julie à rude épreuve. On me le change, le reprépare, rien n’y fait. La tête de mule est en marche, l’équipe doit trouver une solution ! Je veux « Mon Masque ». Sa jupe est extrêmement souple et pour 24h ça va vite devenir essentiel.
La nuit passe. Maxence, Jonathan, Sébastien, Stéphan, Nicco,…se relaient auprès de nous. Le relais enfant fonctionne à merveille. Ils sont incroyables et quand je vois mes enfants ou ceux de Tom, le sport en famille prend tout son sens.
Vers 4h du matin, je passe un moment difficile. Je m’isole de plus en plus, je ne veux pas communiquer, croiser un seul regard. Je veux sortir. Si on me le demande, je sors. C’est le coup de barre. Je sais que c’est une étape à franchir, je ne veux pas être tentée. Je tiens bon, je sors du tunnel. Tout est OK. Je remarque à peine les picotements aux lèvres, les yeux qui m’irritent. Pas l’équipe. Ils s’inquiètent, discutent. Tom me propose d’arrêter, je refuse. L’équipe s’en mêle « 12h c’est bien !! », c’est déjà un record. La tête de mule est de retour car j’ai franchi une deuxième étape : le cap des 12h. A partir de maintenant, je décompte. J’irai jusqu’au bout !
Mais ils sont 4 à me faire face. Thierry, Nico, Stéphane et bien sûr Tom reviennent à la charge. Ils sont très inquiets. Je ne peux pas mener deux combats à la fois et je cède. Ils ont raison bien sûr, d’autant que j’ai vu mon visage à la sortie de l’eau, je ne me suis pas reconnue. Je suis en colère, déçue. Je suis sortie au bout de 13h 20 min d’immersion stoppée par des frottements de l’embout qui ont créé un œdème à la lèvre et par l’excès de chlore dans les yeux dû aux nombreux vidages de masque de début de plongée. On avait tout prévu…….sauf ça !
Marie, Laurent, Julie, Marie-Odile, mes enfants, Virginie, Isa, Alec et tous ceux que j’ai oublié de citer me remontent le moral, me chouchoutent.
C’est dur !!!
J’aurais voulu relever le défi pour le Téléthon, le faire en tant que Femme, prouver aux plongeurs parfois mysogines que les plongeuses ont une vraie place dans ce sport. Elles peuvent descendre à 100m de profondeur, faire des plongées engagées, assister, enseigner,….
Et finalement avec le recul, je sais que je l’ai fait. Pour ceux qui en douteraient, qui oublient de nous compter dans leur palanquée ou qui me prennent en photo « malgré mon échec », j’ai avec une équipe d’enfer des P’tites Bulles établi un record mondial qu’une seule personne a battu. Ok c’est un mec… mais c’est le mien ! “
Emeline MASSON
Crédit photo: Jade Sessa MASSON